Ozempic

09/11/2023
Style injectable Ozempic
Style injectable Ozempic

Une ancienne voisine m'a demandé ce que je pensais de l'utilisation d'Ozempic contre l'obésité. Il ne m'en fallait pas plus pour réfléchir à la question.

Tout d'abord, il faut savoir que ce médicament a été développé par le laboratoire pharmaceutique Novo Nordisk pour aider les personnes diabétiques de type 2 à mieux contrôler leur glycémie. Il s'agit d'un outil précieux et récent faisant partie de l'arsenal thérapeutique novateur contre le diabète de type 2. Ce médicament, et d'autres dans la même classe de médicaments, ont révolutionné le traitement du diabète de type 2. La qualité de vie des diabétiques de type 2 s'est grandement améliorée depuis l'arrivée de ces médicaments. Il suffit d'une seule injection par semaine pour mieux réguler sa glycémie.

La commercialisation d'Ozempic a commencé en décembre 2017. Novo Nordik ayant constaté que plusieurs patients diabétiques de type 2 utilisant Ozempic ont perdu du poids (les pertes peuvent aller jusqu'à 15 % du poids initial) depuis le début du traitement. Il s'agit d'un effet secondaire du médicament. Il semblerait qu'il réduise l'appétit. La compagnie a alors décidé de commercialiser ce médicament contre l'obésité, sous forme de comprimés, sous les noms de Wegovy et de Rybelsus. Il s'agit de la même molécule qu'Ozempic, le sémaglutide, mais en comprimés plutôt qu'en stylo injectable.

Malheureusement, Santé Canada ne reconnaît pas l'usage du sémaglutide pour lutter contre l'obésité, et ce, pour deux raisons :

1) L'historique des médicaments précédents contre l'obésité, notamment

  • En 1979, les amphétamines, qui étaient prescrites contre l'obésité dans certains pays, ont été retirées du marché, car les effets secondaires étaient trop néfastes, notamment une dépendance, de l'hypertension et de l'hyperthermie;
  • en 1997, le fen-phen, un médicament supposément révolutionnaire a dû être retiré du marché à cause de risques accrus d'hypertension pulmonaire et de problème cardiovasculaire.

2) La perte de poids est considérée comme une raison esthétique.

Je trouve ces 2 raisons complètement farfelues, voire ridicules. Les anciens médicaments ont été conçus à une époque où la science ne comprenait pas encore très bien les mécanismes biologiques de la prise et de la perte de poids. Or, les nouveaux médicaments contre l'obésité reposent sur une excellente compréhension des mécanismes susmentionnés et sur des découvertes scientifiques révolutionnaires. Les nouveaux médicaments sont très sécuritaires et leurs effets secondaires sont relativement bénins, s'apparentant à ceux de médicaments très bien connus.

La science considère l'obésité comme une maladie. Elle estime même que l'augmentation de l'obésité dans le monde constitue la première épidémie mondiale n'étant pas causée par un agent pathogène. En 2023, il y aurait environ 30 % de personnes en surpoids et obèses dans le monde et qu'on nous prédit que ce pourcentage pourrait bien passer à près de 50 % en 2035. De plus, la science a déjà démontré qu'être en surpoids ou être obèse a des conséquences désastreuses sur la santé : augmentation importante des risques de diabète du type 2, d'athérosclérose, de dyslipidémie, de maladies du foie, de maladies rénales chroniques, d'apnée du sommeil, de troubles hormonaux, de maladies articulaires, de reflux gastro-œsophagien, de problèmes dermatologiques comme le psoriasis et l'apparition d'une mycose, d'insuffisances veineuses cutanées, de phlébites... Dans de telles conditions, comment Santé Canada peut-elle encore considérer la perte de poids comme une question d'esthétisme?

Il doit y avoir une autre raison qui incite Santé Canada à ne pas autoriser l'utilisation d'Ozempic contre l'obésité. Selon moi, Santé Canada ne veut déplaire ni aux lobbyismes des laboratoires pharmaceutiques ni à celui des régimes d'assurances maladie.

J'aimerais ici faire une précision. Les laboratoires pharmaceutiques et les régimes d'assurances maladie ne se sont pas prononcés publiquement contre l'autorisation de l'utilisation contre l'obésité d'Ozempic et des autres produits de la même classe de médicament. Cela dit, il n'est pas difficile de deviner leurs positions.

Les laboratoires pharmaceutiques savent très bien qu'une personne en surpoids ou obèse souffrant de maladies chroniques consomme une quantité importante de médicaments. Imaginez si, après avoir atteint son poids santé avec l'aide d'un médicament pris pendant 2 ou 3 ans, cette personne ne souffrait plus d'une ou de plusieurs maladies chroniques et, par conséquent, consommerait beaucoup moins de médicaments. On sait aujourd'hui qu'il est possible de guérir du diabète de type 2 en changeant radicalement de mode de vie. J'ai vu à la télévision le cas d'un homme qui vivait avec cette maladie depuis 17 ans. En seulement 2 semaines, son diabète s'est tellement amélioré, que son médecin lui a dit qu'il commençait l'étape de la rémission et qu'il pourrait abandonner tous ses médicaments dans environ 6 mois. Les laboratoires pharmaceutiques canadiens n'ont aucun intérêt à ce qu'un médicament pris temporairement qui guérirait non seulement l'obésité, mais aussi les autres maladies sous-jacentes, soit autorisé au Canada. Alors pourquoi des médicaments comme Ozempic existent-ils? Tout simplement parce que ces médicaments sont autorisés aux États-Unis et y sont vendus à des prix exorbitants (plus chers qu'au Canada).

Pour ce qui est des régimes d'assurance maladie publics et privés, imaginez un instant ce qu'il en leur coûterait si l'utilisation contre l'obésité de ce médicament était autorisée. On parle ici de sommes colossales. On comprend bien pourquoi ils sont probablement contre l'autorisation d'Ozempic contre l'obésité.

Pourtant, un changement de paradigme viendrait grandement améliorer l'accès aux soins de santé. Les personnes en surpoids et les personnes obèses étant plus à risques de souffrir des maladies susmentionnées, certaines doivent prendre des médicaments pour traiter une panoplie de maladies causées par leur condition, doivent consulter plus fréquemment leurs médecins, doivent faire l'objet d'un suivi médical plus fréquent et doivent être hospitalisées plus souvent. Au lieu de considérer les personnes en surpoids et les personnes obèses en aval (c'est-à-dire d'attendre que les maladies se manifestent pour agir), pourquoi ne pas les considérer en amont (c'est-à-dire d'agir sur le poids avant que les maladies se manifestent)? Pour ce faire, il faudrait mettre l'accent sur les personnes et la santé à long terme plutôt que sur les maladies, l'argent et les profits.

En passant, les régimes d'assurances maladie publiques et privés y trouveraient leurs comptes à moyen terme, car la demande pour certains médicaments baisserait considérablement, puisque les personnes anciennement en surpoids ou obèses consommeraient moins de médicaments. Alors pourquoi pense-t-on qu'ils sont contre l'utilisation d'Ozempic contre l'obésité? Difficile d'y répondre. Il se pourrait bien qu'ils soient effrayés par les sommes colossales à rembourser sur le court terme.

Ozempic n'est pas le premier médicament ayant été détourné de son utilisation initiale. Le Pepto-Bismol, que tout le monde connaît bien et qui est bien utile pour le traitement des malaises gastriques, a été utilisé au début du vingtième siècle pour traiter le choléra chez les enfants. Atarax, un antihistaminique puissant et efficace, a été inventé pour traiter l'anxiété. Son nom est dérivé du mot « ataraxie », qui signifie tranquillité profonde de l'âme.

Personnellement, je trouve important d'utiliser tous les moyens à notre disposition pour lutter contre l'obésité. Ayant déjà été en surpoids, je sais qu'il n'est pas facile de perdre du poids. Il faut beaucoup de courage, de ténacité et de volonté. Ce n'est pas tout le monde qui a une volonté à toute épreuve. Ozempic constitue une solution, et il serait temps que son utilisation contre l'obésité soit autorisée.

La pénurie actuelle d'Ozempic au Canada tient au fait que l'utilisation de ce médicament contre le diabète n'est pas encore autorisée par Santé Canada pour lutter contre l'obésité et au fait que des médecins ont décidé de passer outre l'avis de ce ministère et de prescrire ce médicament à des patients en surpoids ou obèses. La pénurie devait prendre fin en octobre 2023, mais Novo Nordisk a informé Santé Canada qu'elle prendra probablement fin au début du printemps. Entre-temps, malheureusement, les diabétiques de type 2 devraient avoir la priorité, car sans ce médicament, leurs conditions pourraient se dégrader rapidement.

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